Jeudi 12 mars 2015
- Marché Phsar Boeung Chloeuk*
- Wat Somrong Knong et le mémorial de Choeng Ek (killing field)**
- Artisans locaux**
- Wat Ek Phnom*
- Vie rurale
- Prasat Banan**
- Phnom Sampeau**
- Rivières de chauves-souris, coucher de soleil superbe et inédit ***
Grasse matinée pour aujourd’hui puisque nous nous levons à ….7h15 !
Très bonne nuit, que nous enchaînons avec un copieux petit déjeuner au bord de la piscine. Pain sorti du four, confitures maisons, fruits frais, c’est la belle vie alors on traîne un peu en discutant avec nos voisins de table.
Vers 8h45 nous rejoignons Nani notre chauffeur de Tuk-tuk. La journée d’aujourd’hui va confirmer tout le bien que nous avons pensé de lui la veille.
Nous suivons tout d’abord la moto de Thibault qui nous a conseillé de faire un tour dans un des marchés de Battambang, le Phsar Boeung Chloeuk.
Phsar Boeung Chloeuk
Oublié des guides (tant mieux !) , ce marché est le poumon commercial de la ville, un peu l’équivalent du Phsar Leu de Siem Reap. C’est le marché local par excellence, foisonnant de marchandises, surpeuplé et bruyant, que nous découvrons accompagné par Thibault.
A l'extérieur, on trouve d'abord les fruits et légumes.
Puis sous une grande halle en tôle sans caractère, les étals se suivent et ne se ressemblent pas.
Un immense "food court" enfumé où toute la ville semble réunie distille ses odeurs de poisson, de viande, de bouillon, de pâtes frites, dans un brouhaha entêtant.De part et d’autres des allées, les marchands de poissons et de crustacés côtoient des stands où les femmes préparent de beaux bouquets destinés aux offrandes. En un geste précis et rapide, cette femme replie les premiers pétales de la fleur du lotus pour en faire une sorte de couronne.
Plus loin, un authentique boulanger s’est installé tandis qu’un couloir nous amène vers la zone dédiée au travail de la viande.
Âmes sensibles s’abstenir ! Nous, on adore ces ambiances, cette diversité.
Au moins, c'est frais |
A midi on mange de la langue |
Les 4 petits cochons :-) |
Nous quittons Thibault et rejoignons Nani pour partir en vadrouille.
Petite pause au poste à essence… en réalité des bouteilles de récupération où est stocké le carburant. La plupart des cambogdiens font leur plein ainsi : bien plus pratique pour remplir le réservoir des motos et scooters, et puis la majorité n’a pas les moyens de faire le plein pour plusieurs jours…
Nous arrivons au mémorial de Choeung Ek.
Choeung Ek : Wat Somrong Knong et le killing field
Premier contact ici avec la part sombre de l’histoire du Cambodge, tellement proche…
Nani nous donne les explications, dans un anglais hésitant et avec une simplicité désarmante. En mai 1976, le temple a été réquisitionné par les khmers rouges et a été transformé en prison, antichambre de la mort. Les paysans qui ne voulaient pas (ou qui étaient soupçonnés de ne pas) se soumettre à la loi khmère étaient déportés dans ce camp où ils étaient torturés et jetés dans la fosse commune.
L’endroit est émouvant, il y règne le silence. On distingue parfaitement la zone où les corps des prisonniers étaient jetés dans la fosse.
Plus loin le mémorial s’élève. On appelle aussi le site “Well of Shadows”.
En son cœur sont présentés les os et crânes des victimes récupérés dans la fosse.
Montrer pour dire que ça a existé. Plus de 10 000 personnes furent exécutés sur ce site.
Les bas-reliefs représentent des scènes atroces de torture, pour raconter et imager les exactions qui ont duré trop longtemps. Quelle folie…
“Les sacs en plastique étaient utilisés pour étouffer les victimes pendant les interrogatoires. Tremper la tête des victimes dans l’eau était un moyen de les terroriser”.
Nous reviendrons de façon plus détaillée sur cette tragédie lors de notre visite du S21 à Phnom Penh.
Nani nous raconte que plusieurs membres de sa famille sont décédés pendant la période des khmers rouges.
Son oncle, le frère de son père était pêcheur. Il perdit un bras le jour où il tenta d'attraper un poisson dans un trou d’eau sur les rives de la rivière. Une mine.
Il nous voit émus. Ces yeux brillent un peu. Nous faisons silence.
Artisans locaux
Un peu secoués par cette étape “sans transition”, nous reprenons les chemins de campagne et faisons une petite halte en bord de route quelques centaines de mètres plus loin, près du centre communautaire de Samroung Knong.
L’occasion de faire de belles photos et de manger un morceau. Toujours aussi délicieux !
Je profite de la pause pour faire quelques photos des alentours.
L’odeur est saisissante mais on s’y habitue. Ici des centaines de tonnes de poisson affluent chaque année pour être transformées en cette pâte de poisson fermenté, utilisé comme condiment dans nombre de plats locaux.
Sous des bâches à plus de 35° à l’ombre, le poisson passe par toutes les étapes de fabrication. Découpé, lavé, foulé au pied, puis il est disposé en couches successives avec quantité de sel dans de grands bacs en plastique ou en bois cerclé. Il fermentent ainsi plusieurs mois, dans un délicat parfum d’ammoniac. Imaginez l’ambiance ! Les yeux piquent un peu :-)
Le prahoc est ensuite vendu à différent stade de maturation, en fonction de la concentration souhaitée ou de l’usage.
C’est super typique, et les touristes sont très rares ici.
Un peu à l’écart, une petite fabrique où des chinois préparent un ragoût bizarre à base de morceaux de gras de... ?
On poursuit la route vers le nord-est par un étroit pont de bois pour parvenir en quelques minutes au Wat Ek Phnom.
Wat Ek Phnom
A notre arrivée nous entendons des enfants réciter dans l’école à droite. De loin la maîtresse nous aperçoit et nous fait signe de nous approcher. Nous montons les quelques marches, et tous les enfants se lèvent pour nous saluer, c’est trop mignon. Alors on fait pareil, on dit d’où l'on vient. Finalement c’est nous qui sommes les plus intimidés.
Et puis la cloche sonne, c’est l’heure du repas, les enfants détalent, enfourchant des vélos bien trop grands pour eux.
Le temple est divisé en 2 parties distinctes. La pagode à l’avant est plus récente, avec son grand bouddha blanc, ses belles statues et ses boiseries colorées. Elle est bordée sur la gauche par un beau champ de lotus.
Sur une petite colline se dresse le temple bâti au XIème siècle, partiellement effondré. Le sanctuaire central est élevé sur une terrasse en grès. A l’intérieur, l’autel est richement fourni en offrandes et objets de décoration divers.
Ce temple est un lieu de pèlerinage très fréquenté par les cambodgiens.
Nous profitons d’un petit marchand pour boire un jus de noix coco bien frais, en compagnie de Nani.
Un endroit bien agréable.
Corvée d'eau ! |
Bananes séchées |
Vie rurale dans la campagne de Battambang
Nous quittons les lieux vers 12h pour partir vers le sud. Au village de Pheam Ek, Nani nous fait faire une nouvelle pause dans une fabrique de galettes de riz. Des ouvrières sont à l’oeuvre en binôme, les gestes sont répétés sans lassitude, précis, mécaniques.
Une fine couche de pâte de riz est étalée sur un tissu sous lequel l’eau boue doucement. Le feu est alimenté en continu par les déchets issues du traitement du riz récupérés après séchage et décorticage.
La femme couvre la galette d’un couvercle et la laisse cuire à la vapeur quelques secondes, puis elle la soulève et la dépose sur une sorte de tourniquet en bambou où elle s’égoutte quelques secondes. Ensuite la galette est récupérée sur le manche par l'autre ouvrière pour être déposée délicatement sur un treillis en bambou.
Lorsque le cadre est plein, les galettes sont mises à sécher en plein soleil, au bord de la route. Elles sont ensuite vendues en gros aux commerçants, pour être écoulées sur les marchés. La majorité finira en rouleaux de printemps après réhydratation.
Nous reprenons la route en direction du sud. Nous traversons à nouveau la rivière Sangker sur une étroite passerelle aux allures de pont de singe. Nous demandons à Nani de nous arrêter non loin de la rivière. Ici des habitations plus que modestes, des paysans et leurs bêtes, des pécheurs.
Nani nous cerne bien : lorsque nous reprenons la route, il nous fait passer par des chemins au milieu des champs. Ça secoue un peu, mais c’est tellement plus agréable. Nous faisons de courts arrêts par ci par là, on prend notre temps.
Roussettes frugivores - petite sieste |
Après une heure de chemins tranquilles nous arrivons au pied du Phnom Banan.
Prasat Banan
Avant de nous lancer dans la grimpette, nous faisons une pause à l’ombre dans une petite buvette déserte. Pour quelques dollars une jeune fille nous sert à boire et nous découpe noix de coco et ananas. Nous n’avons pas grande faim, surtout envie de nous rafraîchir.
Nous partons à l’assaut des 358 marches : l’effort pourrait paraître léger, pourtant la chaleur nous écrase et rend la dernière partie de l’ascension plus difficile que prévue.
Tout en haut, assis sur les grosses marches en mode “récupération”, nous regardons les visiteurs souffrir comme nous. Un petit groupe de moines crée l’attraction. Trop beaux dans leur robe orange vif.
Spectacle insolite : des gamins les suivent pour les rafraîchir à grand coup d’éventail.
Le temple en lui-même est très agréable. Partiellement ombragé, il fut bâti par le fils de Suryavarman 1er au XIème siècle. Les tours en bon état de conservation sont ornées de beaux linteaux.
Nous retrouvons les moines qui visitent les lieux et se prennent en photo. L’un d’eux veut me prendre en photo, alors j’accepte et en échange je le photographie avec son collègue sur son smartphone dernier cri.
Nous repartons avec Nani par de petits chemins cahoteux et poussiéreux. Il nous explique que cette zone est recouverte de rizières en saison des pluies. A cette saison nous sommes trop loin du lac pour que les champs puissent rester irrigués. Nous comprenons qu’il est déçu que nous ne puissions profiter de ce paysage. Il nous fait passer par ici car il aime beaucoup ce coin. Nous croisons quelques fermes ça et là.
Phnom Sampeau
Cet ensemble de temples domine la plaine du haut d’abruptes falaises de calcaire.
A mi-chemin du sommet, nous arrivons à un premier temple entièrement peint. La vie de bouddha est racontée sur les fresques colorées. Par une porte et un petit chemin sur la gauche, précédés de Nani nous arrivons aux grottes charniers, devenues lieu de pèlerinage.
Il règne ici une atmosphère particulière : il y flotte une légère brume provoquée par la vapeur d’eau, un silence respectueux, propice au recueillement. Imaginer quelques minutes les corps précipités à travers l’ouverture qui perce la roche quelques dizaines de mètres au dessus de nos têtes.
Nous terminons l’ascension alors que le soleil commence à décliner. Au sommet nous trouvons de nouveaux temples, des autels fleuris et de beaux stupas dorés gardés par des singes qui ne semblent pas commodes. Ils se balancent de branche en branche au dessus du vide, alors que la plaine s’ouvre au regard.
Une cérémonie se déroule, l’occasion de nous asseoir pour la suivre pendant quelques minutes. Les fidèles enchaînent les gestes de dévotion et les offrandes.
Rivières de chauves-souris
Nous redescendons à pied avec Nani et repartons avec son tuk-tuk.
Le spectacle attire ici des foules de personnes : des centaines de milliers de chauves-souris surgissent des failles de la falaise, inlassablement chaque jour, à la tombée du jour.
Mais les touristes se massent tous au même endroit le long des accès principaux…
Alors Nani nous sort le grand jeu, contourne la falaise, et nous amène par un sentier exactement à l’endroit d’où les chauves-souris jaillissent, face à la plaine et au soleil couchant.
Nous ne sommes même pas une dizaine ici. Le spectacle est absolument incroyable. Outre le piaillement strident des bestioles, l’odeur du guano est limite supportable à l’approche du trou d’où en sortent des flots incessants.
Petite vidéo pour le son et l'image.
Instant magique tout autant qu’unique, dont nous profitons jusqu’à ce que le soleil disparaisse.
Au top, ce Nani.
Adieux quelque peu émus…
Nous posons nos affaires et descendons profiter de la piscine. Thibault est au bar, on boit quelques bières en discutant avec lui de notre journée. Il nous parle de leur nouvelle vie ici, des affaires qui tournent plutôt bien. Sympa !
Nous réglons nos nuitées et quelques extras dont nos billets de bus du lendemain pour Sihanoukville via Phnom Penh.
Un peu avant 20h nous décidons d’aller manger au Bamboo train café. Lorsque nous arrivons devant le restaurant, la grille est fermée. Mais il y a de la lumière et des chiens aboient à l’intérieur. Au moment où nous nous apprêtons à repartir, une dame et sa fille viennent nous ouvrir. Nous comprenons qu’il est possible de manger. Nous sommes les seuls clients du soir, alors nos hôtesses sont aux petits soins. Malgré une grosse hésitation sur la préparation des Tequila sunrise en apéro, le repas est très correct. Au moment de payer l’addition, la gamine met la musique. Tryo à fond ! La maman nous explique que sa fille adore, elle écoute le groupe en boucle sur internet et en profite pour mettre les watts quand ils ont des clients français.
C’est ainsi que nous terminons cette belle et riche journée, une plongée dans l’âme du Cambodge et toute la diversité que ce pays peut offrir.
6 commentaires:
Superbe!!!On respire vraiment l'âme du pays avec ses contrastes du sublime à l'atroce historique! Magnifiques photos des marchés, des gens, (les enfants), des temples inséparables de la nature qui les enserre rajoutant à leur beauté!!
Bravo!
Je m'étais promis d'attendre la fin avant d'écrire un commentaire, alors je ne vous poserais qu'une question ;) Sur la première photo du marché, est-ce un cuisinier qui travaille avec un casque de moto??
:)
C'est l'avantage du casque : on peut tout imaginer :)
(ce n'est pas la première photo, mais la septième !)
ps : au fait, "la fin" de quoi ?
La fin du carnet :)
Je n'avais pas vu votre réponse, je suis prise en flagrant délit de re lecture.
J'adore tout autant que la première fois :) Ce sera à mon tour de visiter le Cambodge, mon bille test acheté, j'y passerai tout le mois de mars 2018.
Vous écrivez un des blogs, pour ne pas dire LE blog, qui m'inspire et me rejoint le plus.
Merci :)
Merci à vous, pour votre persévérance et votre fidélité.
Je suis toujours ravi que le blog puisse être source d'inspiration :-)
Vous allez vous régaler... Un mois au Cambodge, nous en rêvons !
Bons préparatifs pour ce beau voyage
Au plaisir de vous lire et à bientôt
Fabrice
(n'hésitez pas à vous abonner à la page Facebook de De loin en large ;-)
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